remèdes
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Le reportage de l'émission La Facture du 6 mars 2018 sur le recours collectif intenté contre Boiron pour son médicament homéopathique Oscillococcinum? Une excellente opportunité que nous saisissons pour informer davantage, apporter quelques nuances et contribuer à la réflexion.

L’émission de Radio-Canada, La Facture, a présenté, mardi le 6 mars 2018, un reportage concernant le recours collectif contre le laboratoire Boiron pour son médicament homéopathique Oscillococcinum.

 

Cette poursuite a été instituée par des consommatrices et consommateurs qui ont acheté le produit en vue de soulager des symptômes tels que courbatures, fièvre, maux de tête, habituellement associés aux états grippaux et qui n’ont perçu aucun effet thérapeutique.

 

D’entrée de jeu, il peut être utile de s’interroger sur les symptômes pour lesquels la première consommatrice du reportage a pris la préparation. Le soulagement de la congestion au niveau du nez et des oreilles ne font pas partie des allégations thérapeutiques de ce médicament homéopathique et lorsqu’un malade en est rendu à recevoir une prescription d’antibiotiques, c’est qu’il est au prise avec une infection bactérienne et non virale – un type d’infection pour lequel Oscillococcinum n’a aucune indication.

 

La cause est devant les tribunaux et nous ne pouvons bien sûr la commenter. Par contre, nous pouvons profiter de l’opportunité offerte pour mieux informer et apporter quelques nuances, quelques faits nouveaux ou encore mal connus.

 

Le doute sur l’efficacité et les études

«Pour prouver que l’homéopathie est inefficace, il faudrait mettre de côté plus de 90% des études.» – Robert G. Hahn

Cette cause ramène le débat de fond sur l’efficacité de l’homéopathie qui continue d’être alimenté pour une très simple raison : le mécanisme du fonctionnement du remède homéopathique, qui fait toujours l’objet de recherches, n’a pas été encore élucidé. Ce qui fait que pour l’instant, aucune loi scientifique connue à ce jour dans les domaines de la biologie, la chimie et la physique, n’arrive à en expliquer son fonctionnement. Rappelons que de manière similaire, l’acupuncture, cependant moins controversée, ne répond également à aucune de ces lois.

 

En ce qui concerne l’homéopathie, cette apparence de mystère qui persiste a, pour une partie de la communauté scientifique, qu’une seule explication possible : l’effet placebo.

 

En 2011, le gouvernement suisse a mandaté un groupe d’expert-es indépendant-es pour justement évaluer cette efficacité au-delà du placebo suite à la demande pressante de la population et du corps médical. Toutes les publications internationales sur les preuves de l’efficacité de l’homéopathie ont été évaluées. Ce rapport en est arrivé à la conclusion que l’homéopathie est efficace, qu’elle est sécuritaire et qu’elle présente un coût/bénéfice non négligeable. [1]

 

Lire les grandes conclusions de ce rapport.

 

De même, une étude statistique sur un ensemble de recherches (méta-analyse) faite par un chercheur indépendant et non-homéopathe, le Dr. Robert G. Hahn, directeur de la recherche à l’hôpital de Södertälje, en Suède, arrive à la conclusion que pour prouver que l’homéopathie est inefficace, il faudrait mettre de côté plus de 90% des études. [2]

 

En matière de rapport, on ne peut évidemment passer sous silence l’imposant rapport australien[3] qui en était arrivé à des conclusions d’inefficacité et ce pour 61 problèmes de santé évalués. Cette publication a reçu une large attention des médias, en 2015, qui avaient annoncé la fin de l’homéopathie. Aujourd’hui, ce rapport ainsi qu’une plainte formelle est entre les mains de l’Ombusdman du Commonwealth pour fraudes et irrégularités scientifiques majeures. Entre autres, grâce à la loi de l’accès à l’information, il a été découvert l’existence d’un premier rapport aux conclusions positives caché au grand public.

 

Mentionnons enfin le corpus de recherches effectuées sur les plantes, les animaux et les cultures de cellule (in vitro) où il devient absolument impossible d’y percevoir un quelconque effet placebo. Qu’un seul exemple patent : une étude encore récente publiée par le département de médecine de l’Université de Vérone en Italie. [4] On a observé après administration de préparations homéopathiques d’Arnica à des cellules en culture, une activation significative des gènes responsables de la réparation cellulaire après blessure.

 

 

Des appareils qui ne «voient» que du sucre et de l’eau

« Des recherches très récentes faites grâce à la résonnance magnétique nucléaire[5] et la spectroscopie Raman[6] permettent, en effet, de détecter ce que les appareils de la chimiste de l’Université de Montréal n’ont pu détecter. »

 

Revenons au reportage de Radio-Canada. La chimiste de l’Université de Montréal, Alexandra Furtos, a bien spécifié qu’avec les deux méthodes utilisées et avec les appareils à sa disposition, elle n’a pas pu mettre en évidence autre chose que le sucrose et le lactose, soit les ingrédients non-médicinaux de la préparation d’Oscillococcinum.

 

Il existe effectivement d’autres appareils et d’autres méthodes, qui ne sont probablement pas à sa disposition, qui lui aurait permis de bien démontrer qu’il y a autre chose que du sucre ou de l’eau pure. Des recherches très récentes faites grâce à la résonnance magnétique nucléaire[5] et la spectroscopie Raman[6] permettent, en effet, de faire ce que les appareils qu’elle a utilisés n’ont pu faire. L’utilisation de teintures solvatochromiques[7] [8] aurait également produit un résultat différent de celui présenté dans le reportage. Et il est évident également qu’elle n’avait pas entre les mains l’équipement et la méthode utilisés par Montagnier en 2009, qui ont permis à ce prix Nobel de mesurer les émissions électromagnétiques d’ADN qui demeurent dans l’eau même lorsqu’il ne reste plus d’ADN après dilutions. [9]

 

Le risque associé au délai de traitement

 

L’avocat de la poursuite allègue la notion importante du risque encouru. Il estime qu’en utilisant un produit homéopathique, il peut y avoir un délai de traitement présentant un risque pour la santé. Il est important de savoir qu’à ce jour, aucune recherche faite sur cette question n’a réussi à démontrer cet argument. À titre d’exemple, mentionnons l’étude épidémiologique, EPI 3, faite en France, sur 8559 patients divisés en 3 groupes; ceux traités en homéopathie seulement, ceux traités avec médicaments conventionnels seulement et ceux traités avec les deux approches. La recherche qui s’est échelonnée sur 4 ans a bien démontré qu’aucune prise en charge faite par l’une ou l’autre des méthodes n’a amené un risque pour la santé ou une évolution vers davantage de chronicité. [10]

 

 

Les références historiques comme preuve

« Les lois du mouvement de Newton ont été publiées en 1687. Aurait-on idée de ne plus utiliser les principes de la mécanique newtonienne dans la construction des voitures et des avions sous prétexte que cet ouvrage n’est qu’une «ancienne référence historique»? »

 

Dans certains cas, il est exact d’affirmer qu’il suffit d’une référence historique pour homologuer un produit de santé naturel auprès de Santé Canada, mais pas dans tous. La règlementation est plus complexe que ce qui transparaît dans le reportage. Et une remise en perspective mérite d’être apportée en ce qui concerne l’homéopathie spécifiquement lorsqu’on aborde cette notion de référence historique.

 

Les outils de référence utilisés par un homéopathe proviennent de deux types d’ouvrage, les matières médicales (MMP) et les répertoires homéopathiques. Les MMP sont des recueils de toutes les expérimentations relevées par des individus en pleine santé ayant expérimenté une substance. Un seul remède homéopathique peut donc faire des centaines de pages de descriptions de symptômes qui sont consignées dans ces outils de référence. D’autres sources nourrissent aussi la MMP, par exemple la toxicologie bien connue de la substance. Les répertoires homéopathiques, quant à eux, fonctionnent à l’instar d’une banque de données contenant l’ensemble des symptômes et pouvant ainsi servir de guide dans le choix d’un remède en pratique quotidienne.

 

Il y a là une rigueur méthodologique réelle. Cette démarche scientifique de connaissances des effets médicinaux ou thérapeutiques des substances a un recul de plus de 200 ans pour les plus anciennes d’entre elles. On a tendance à l’oublier mais les homéopathes ont été les premiers à appliquer une méthodologie des plus rigoureuse dans l’histoire de la pharmacologie et de la médecine.

 

Les lois du mouvement de Newton ont été publiées en 1687. Aurait-on idée de ne plus utiliser les principes de la mécanique newtonienne dans la construction des voitures et des avions sous prétexte que cet ouvrage n’est qu’une «ancienne référence historique»?

 

 

L’homéopathie dans le monde – inégalités des droits et possibilités…

 

Santé Canada veut revoir sa règlementation actuelle pour les Canadiens et Canadiennes mais peut-elle le faire en faisant fi complètement de ce qui se passe à travers le monde? Il serait difficile de croire que l’agence fédérale ne soit pas au courant que l’homéopathie est intégrée au système de santé de la France, la Suisse, la Belgique, l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Mexique, le Chili, le Brésil, la Colombie, Cuba, l’Inde et l’Afrique du Sud. Il serait difficile de croire aussi qu’elle ne soit pas au courant que cette homéopathie est enseignée dans les universités de l’Australie, la France, la Norvège, le Brésil, l’Argentine, l’Inde, l’Afrique du Sud, le Mexique et le Portugal.

 

Force est de constater que les citoyens d’Europe et ceux du Canada, par exemple, ne jouissent pas des mêmes droits et possibilités en santé. Cette inégalité d’accès va à l’encontre des valeurs et principes canadiens, ainsi que des recommandations de l’OMS, formulées en 1998. [11]

 

Rappelons, en terminant, que dans sa mission de maintenir et améliorer la santé des Canadiens et Canadiennes en assurant un accès à des produits sécuritaires et efficaces, Santé Canada sait également qu’elle a comme mandat de préserver la liberté de choix et de culture des citoyens et citoyennes du pays.

 

 

 

 

 

 

[1] Bornhöft G. et P. Matthiessen (eds) (2011). Homeopathy in healthcare – effectiveness, appropriateness, safety, costs, Berlin, Springer-Verlag, 234 p.

 

[2] Hahn R. (2013). « Homeopathy: meta-analyses of pooled clinical data », Forsch Komplementmed. 2013;20(5):376-81. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24200828

 

[3] National Health and Medical Research Council.(2015). NHMRC Information Paper: Evidence on the effectiveness of homeopathy for treating health conditions. Canberra: National Health and Medical Research Council http://www.nhmrc.gov.au/guidelines-publications/cam02

 

[4] Marzotto M, Bonafini C, Olioso D, Baruzzi A, Bettinetti L, Di Leva F, et al. (2016) « Arnica montana Stimulates Extracellular Matrix Gene Expression in a Macrophage Cell Line Differentiated to Wound-Healing Phenotype. » PLoS ONE 11(11): e0166340. doi:10.1371/journal.pone.0166340

 

[5] Van Wassenhoven M, et al., « Nuclear Magnetic Resonance characterization of traditional homeopathically-manufactured copper (Cuprum Metallicum) and a plant (Gelsemium Sempervirens) medecines and controls », Homeopathy (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.homp.2018.08.001

 

[6] SarkarT; Konar A; Sujul NC; Singaha A; Sujul A. « Vibrational and Raman spectroscopy provide further evidence of free OH groups and hydrogen bond strength underlying difference in two more drugs at ultrahigh dilutions. » Int J High Dilution Res. 2015;15(3): 2-10

 

[7] Cartwright SJ (2018). « Degree of Response to Homeopathic Potencies Correlates with Dipole Moment Size in Molecular Detectors: Implications for Understanding the Fundamental Nature of Serially Diluted and Succussed Solutions. » Homeopathy; 107(01): 019-031 DOI: 10.1055/s-0037-1617448

 

[8] Cartwright SJ. (2016) « Solvatochromic dyes detect the presence of homeopathic potencies. » Homeopathy 2016; 105: 55-65

 

[9] Montagnier, L. et al. (2009). « Electromagnetic signals are produced by aqueous nanostructures derived from bacterial DNA sequence», Interdiscip Sci Comput Life Sci, 1 : 81-90

 

[10] https://www.ffsh.fr/images/com_hikashop/upload/cahiers/246/cahiersdebiotherapie-246-epi3.pdf

 

[11] Taillefer, A. (2009). Impact médical et social de la consultation en médecine homéopathique chez les mères: une question de paradigme, Mémoire de maîtrise en sociologie, Montréal, Université du Québec à Montréal, 331 p.

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